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2018 - Pamiers dans la tourmente ou la naissance du Trentat (1398 – 1407)

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A l'occasion des journées européennes du Patrimoine la Municipalité avait souhaité que je présente l'histoire de quelques bâtiments dont la Mairie, les mairies devrais-je dire.

C'est là que j'ai rencontré le Trentat, soit la première maison de ville de la cité. Il n'en reste rien, pas une seule pierre et j'ai eu beaucoup de mal à retrouver son implantation grâce à un plan d'alignement. Elle se trouvait donc exactement dans la section D du cadastre sous les numéros 2360 et 2361 ; elle a été démolie pour agrandissement de la rue vers 1858. Mais pourquoi ce nom ? Les mairies s'appellent généralement aux hautes époques dans notre région « maison des consuls, maison commune, hôtel de ville » … mais Trentat ? Le docteur Ourgaud, maire de Pamiers de longues années au XIXe siècle et qui fit paraître en 1865 la première histoire de la ville a vu l'éfice in situ, avant sa disparition. Il le décrit ainsi : La Curie, le Trentat enfin « congregati domo communi Appamiarum vocata lo Tenta » que le temps avait teint de vétusté, siège des Trente Scabins, syndics et consuls de la cité et le lieu de tant d'assemblées … démoli par les édiles de la dernière République ! Belle envolée lyrique qui me posa la question de l'emploi du mot Scabin ou Eschevins, ces conseillers qui dans les grandes cités drapières du Nord entouraient le mayeur ou maire. .Ma curiosité éveillée, je fis quelques recherches dont je vous donne aujourd'hui les conclusions peut-être provisoires.

Le nom donné à Pamiers à la Maison commune est facile à comprendre :  il vient du nombre des conseillers (cinq par quartiers) qui choisissaient les consuls. Mais depuis quand portent-ils ce nom et pourquoi ce dernier a-t-il été donné à la bâtisse elle-même ?

La première mention que nous ayons de la communauté urbaine constituée de Pamiers dans les archives communales se trouve dans la charte des libertés accordée par Maurin de Montlaur aux habitants, le 15 janvier 1229. La ville est dite gérée par un consulat qui est présenté comme un octroi généreux de l'abbaye à la ville. S'agit-il vraiment d'un don ou le consulat existait-il déjà ? Y a-t-il eu pression des habitants ou intention de la part de la riche abbaye qui pouvait penser y trouver un avantage pécuniaire ? Je ne peux pas vous le dire, simplement rappeler que nous sommes en pleine expansion urbaine. En 1230 donc Pamiers est d'après cette charte une ville gérée par des consuls, dotée donc d'une juridiction consulaire et qui peut lever des contributions pour son entretien. Retenons bien ceci car l'argent est le nerf de la guerre. Je ne vais pas m'étendre sur la façon dont, selon la charte, ces consuls devaient être élus chaque année, le 29 juin, jour de la Saint Pierre et Saint Paul. Notons seulement qu'ils sont aidés dans leur gestion quotidienne dès l'origine par des syndics nommés par eux et par des trésoriers (donc pour maintenir l'ordre et pour lever l'argent). De la maison de ville, il n' est pas question : les archives de la ville qui devaient se réduire à quelques parchemins qui sont conservés dans un lieu sacré, dans le couvent des Frères Prêcheurs, bien à l'abri dans un coffre (une arca) à quatre serrures dont les consuls seuls détiennent les clés. Le sceau de la cité, la marque de son identité est, lui, rangé dans un petit coffre à deux clés (l'une pour le consul du Camp ou de Villeneuve et la seconde pour celui du Mercadal ou des faubourgs, les baris). Le coffret se promène ainsi chaque année d'un quartier à l'autre et cette coutume est encore attestée au milieu du XVe siècle. Pour faire face à ses dépenses la ville perçoit les amendes que lui procurent ses droits de police et de justice et peut lever des taxes directes ou indirectes. Voici un court condensé de la charte de Maurin de Montlaur, maintes et maintes fois copiées et recopiées. Elle était fondamentale pour les Appaméens et chaque nouveau comte, chaque nouvel abbé puis évêque ne pouvaient pénétrer pour la première fois dans la cité, y faire son entrée qu'après avoir stationné devant la porte de Lestang et y avoir juré à la population de conserver ces libertés et privilèges. Les chartes étaient toujours ensuite (du moins en principe) rangées chez les Prêcheurs dans le coffre. On en conserve un grand nombre : elles ne sont toutefois pas parfaitement identiques et leur étude approfondie fait apparaître des situations de fait intéressantes …

Nous ignorons à peu près tout de la vie quotidienne des Appaméens aux XIIIe et même XIVe siècle. Aucun document n'a été conservé qui permette de la décrire. Les registres de délibérations, les estimes ou compoix (les ancêtres du cadastre), les registres notariés, les registres de comptabilité, les rôles de tailles (les impôts directs) ne sont conservés qu'à partir de 1390-1400. Pour la période antérieure les documents sont plus rares et nous permettent essentiellement de comprendre que la ville de Pamiers, qui est riche et prospère, fait l'objet de moult convoitises de la part des seigneurs laïc (le comte de Foix), ecclésiastique (l'abbé puis l'évêque) et même du roi de France. Mais pourquoi le roi de France s’intéresse-t-il à une ville comme Pamiers ? Nous le devons beaucoup à Bernard Saisset, le premier évêque de la ville, grâce au paréage (contrat) qu'il conclut avec le Roi de France …

Cette ville, objet de convoitises multiples est donc surtout connue grâce à des archives royales, et surtout judiciaires, comtales, épiscopales. Et ces documents nous montrent un drôle de consulat. Etait-ce vraiment la réalité ? Les faits n'ont-ils pas été caricaturés ? Nous voyons le viguier de Pamiers, le représentant du comte dans la ville, blessé par un habitant, la Boulbonne envahie par des Appaméens en armes, des consuls qui restent des années en place, des tavernes ouvertes le dimanche aux heures du Saint Office, des dizaines de crimes voire d'homicides impunis … Ce qui est certain, c'est qu'à chaque délit donnant lieu à procès la ville paie pour être graciée : en 1310, 7000 livres de petits tournois.  En 1330, le roi appesantit derechef sa main sur la ville : le consulat est confisqué et la ville condamnée à 4000 livres d'amende. Ceci ne fait pas l'affaire du comte et de l'évêque et comme la ville essaie de négocier sa peine, le roi la remet contre 2000 livres au comte et à l'évêque sous le motif que le peuple n'a pas été consulté dans cette affaire. Le comte et l'évêque reconnaissent toutefois les coutumes et libertés de la ville sauf le droit au consulat. Or, cette confiscation du consulat va durer de nombreuses années. En fait durant tout le règne de Gaston Fébus, dont le gouvernement personnel, après une courte régence de sa mère, débute en 1345 pour se terminer par sa mort subite aux environs d' Orthez en août 1391, au retour d' une chasse à l'ours. Cela signifie que durant presque toute la seconde moitié du XIVe siècle Pamiers est une ville punie, sans consulat, gérée par des syndics, étroitement surveillée par les hommes du comte (le viguier) et de l'évêque (le prévôt).  Or, ce demi- siècle est très important car toute l'administration se met alors en place au niveau national, comtal, comme au niveau municipal. Une des principales raisons en est le long affrontement entre les royaumes de France et d'Angelterre, que nous connaissons sous le nom de guerre de Cents Ans.

Vous savez tous que Gaston Fébus, brillant stratège, a voulu et partiellement réussi, à constituer un vaste état pyrénéen composé principalement du Béarn (dont l'indépendance fut un fait acquis jusqu'à la mort de Louis XIII) et du comté de Foix. Pour mener à bien cet ambitieux projet le comte Soleil avait besoin d'argent, de beaucoup d'argent. Certes la victoire de Launac en 1362 ,qui lui permit de rançonner toute la noblesse languedocienne lui en donna beaucoup mais ce ne fut pas suffisant. Cet argent permit toutefois à Fébus de mettre sur pied une armée et de fortifier ses villes méthodiquement sur l'axe Mazères-Orthez qui lui permettait de faire la jonction entre ses deux comtés de Béarn et de Foix.  Mais Pamiers, me direz-vous, n'est pas sur cet axe. Et pourtant Pamiers s'est fortifiée … mais dès 1356, donc avant la victoire de Launac et par elle-même. Pamiers a agi comme nombre de villes marchandes prospères (je pense à Albi, Agde, Pézenas) à qui le sénéchal de Carcassonne a conseillé très vigoureusement de se fortifier dès que les bandes du Prince Noir ont traversé la Garonne en semant la terreur sur leur passage jusqu'à la ville basse de Carcassonne. Les Appaméens obtinrent donc en 1356 du comte le droit de lever une taxe, l'aide (une sorte de TVA) sur le pain, le vin et la viande pour trois ans afin de mener à bien cette construction. Le travail fut fait par Pierre d'Encontre et Jean Badalier contre 990 moutons d'or. En 1358, la ville dépensa encore 1330 florins d'or pour les cent brasses construites par le maître maçonnier Bernard Carême au faubourg de Loumet. Ce rempart dont on ne voit plus que des vestiges aujourd'hui, allait de la tour du Barriol à Lestang en longeant le canal de Sainte-Hélène. La levée de l'impôt paraît avoir eu lieu sans problème et avoir donc permis de récupérer à peu près 20 000 florins, une somme importante. Nous nous devons de remarquer que dans une région qui n'était pas encore touchée par la guerre, les habitants certes l'ont payée mais aussi tous ceux des bourgs voisins qui venaient aux trois marchés hebdomadaires et aux foires. Les Appaméens ont gardé une grande reconnaissance aux constructeurs de leurs remparts protecteurs et le 10 décembre 1404, ils exonèrent toujours les héritiers de Bernard Carême du paiement d'un impôt attendu que leur père a fait beaucoup et rendu de grands services à la cité lorsqu'il était en vie.

L'armée de Fébus, la ville y envoya très peu d’ hommes. Elle avait parmi ses privilèges celui que ni l'abbé, ni le comte ne pouvaient y lever une armée, mais en revanche, la ville pouvait le faire pour se défendre. Lorsque Pamiers acceptait donc de répondre aux appels des comtes pour une quelconque chevauchée militaire, elle ne le faisait qu'en soulignant qu'il s'agissait de sa part d'un geste gracieux, qu'elle faisait un don au comte. En fait les Appaméens se sont très peu battus durant ces années. En revanche, ils ont payé beaucoup, comme toutes les autres villes. Car pour entretenir ses troupes, qu'ils voulaient aguerries, Gaston Fébus avait mis en place une fiscalité permanente, et là il ne s'agissait plus du tout de don -même si des dons , comme nous le verrons, la ville continua à en faire beaucoup. En faisant cela, le comte Gaston a imité tous les autres souverains ses contemporains, dont le roi de France Charles V, en levant chaque année, régulièrement des sommes importantes pour répondre à des impératifs défensifs et militaires. Mais donnons la parole à Froissart « Aussi leva-t-il des tailles sur son pays et sur les villes, tailles qui existent encore aujourd'hui et qui dureront tant que le comte vivra. Il prend sur chaque feu 2 fr. et le fort portant le foible ...D'abord mis en place à titre d'essai dans le Béarn, cet impôt, le fouage fut bien sûr étendu au comté de Foix. Il s'agit d'un impôt fixe pris sur une famille, un feu, un ostal et il portait pour cette raison le nom de fouage. Le rôle de 1399 concernant le comté de Foix est parvenu jusqu'à nous. Pamiers y est inscrite pour 1150 feux, la ville laisse ainsi loin derrière elle Foix, 744, Mazères 497, Tarascon, 201 mais aussi Orthez, 436, Morlaas 300 et Pau 128. La mise en place de cet impôt annuel entraîne ipso facto la mise en place d'une administration fiscale à l'échelon comtal mais aussi à l'échelon urbain.

Il me faut là faire une parenthèse. Pamiers depuis 1229 peut lever des impôts et l'administration municipale est libre de les lever comme bon lui semble. Le fait qu'elle ait choisi en 1358 l'impôt indirect, l'aide ou ajude pour payer ses remparts peut faire penser, comme le faisait François Baby qu'elle privilégiait cette forme d'impôt dont de surcroît elle affermait l'encaissement et donc dont elle ne s'occupait pas. La modicité du personnel mentionné dans les premiers registres de délibérations peut lui donner partiellement raison. Mais deux registres d'estimes (ancêtres du cadastre) sont parvenus jusqu'à nous pour les années 1350 et 1399. Tous les deux ont été étudiés et François Baby s'est d'ailleurs largement servi du travail réalisé sur celui de 1350 pour dessiner les visages de Pamiers, ville occitane. Ces recensements de la totalité des biens immeubles et meubles (ces derniers sous la foi du serment) mais les premiers très soigneusement vérifiés maison par maison et arpent par arpent de terre étaient fort onéreux. La ville levait donc d'autres impôts directs que le fouage, elles levaient ce que de nombreuses villes du Languedoc appellent à la même époque des comus, des impôts communs qui servaient à des besoins communs. Comment était levé cet impôt à Pamiers du temps de Fébus, nous l'ignorons. Nous savons en revanche qu'il était bis-annuel : il y a une paga (contribution) de Pâques et une du Premier Novembre. Dès les années 1380 cette taxe sur le patrimoine différenciait les biens immeubles des biens meubles, lo moble. Dans de nombreuses villes du Languedoc on y ajouta à la fin du XIVe siècle une sorte de capitation, appelée un peu partout lo comu de la testa, qui pénalisait beaucoup les petites fortunes bien sûr et qui poussèrent le petit peuple à la révolte dans de nombreuses villes. Pour éviter ces insurrections du populaire, de nombreuses cités firent comme Toulouse et à compter de 1380 levèrent un impôt composé d'une imposition sur la première livre de revenu (variable), une sorte de capitation donc et une taxe moindre sur le reste du capital. Tous les historiens de Pamiers sont muets sur l'emploi dans la ville d'un tel impôt qui a bien pourtant été levé à Pamiers dès 1400 et les Appaméens avaient même envoyé à Toulouse des émissaires pour étudier ce mode de perception. Le 16 août 1402, les syndics feront une gratification de 10 écus à Jacques Ros, bachelier en décrets de Toulouse qui a assumé des voyages du temps des consuls, avant la guerre, et qui vient de leur donner des conseil sur la taxation de la première livre.

Voici donc quel était l'état somme toute assez prospère de Pamiers le 1er août 1391 lorsque meurt Gaston Phébus. Il avait tué quelques années auparavant son fils unique et il ne laissait que des bâtards. Sa succession échut à un cousin, Mathieu de Castelbon, âgé de 17 ans, fiancé à Jeanne, fille du roi d'Aragon. La succession s'avérait un peu délicate car Phébus entretenait des relations conflictuelles avec cette branche cadette et ses bâtards avaient quelques prétentions. La succession se passa néanmoins fort bien, le roi de France reconnut Mathieu de Castelbon dès la fin décembre 1391 mais il l'avait été dès la fin de l'été par le pays de Foix. Il fit ses entrées à Varilhes, Pamiers et Mazères qu'il alla visiter pour s'attirer leurs bonnes grâces et c'est ainsi qu'il rendit à Pamiers son consulat et son organisation consulaire. Ceci donna lieu à la rédaction d'une belle charte, la charte du Comte Mathieu également signé par l'évêque Bertrand d'Ornesan (évêque depuis 1380). Cet acte si souvent rappelé dans les textes ultérieurs fut attaqué devant le Parlement par le chapitre cathédral à qui l'évêque n'avait pas demandé son avis. Le 14 juillet 1395 le comte et l'évêque rendirent de surcroît une ordonnance sur la façon dont les élections consulaires devaient se passer. Les consuls, au nombre de 6, un par quartier, étaient élus de façon indirecte : chaque quartier devait choisir deux hommes et donner leur nom aux anciens consuls, qui eux nommaient 5 hommes par quartier.
C'est ce collège de 30 hommes-qui va être appelé le Trentat- qui choisissait parmi les 12 signalés les 6 les plus dignes d'être consuls. Enfin tout ceci en théorie, bien sûr, sur le parchemin. On peut sans se tromper, même s'il n'en reste aucune preuve écrite assurer que la ville a fait un don très généreux au comte Mathieu, pour sa première entrée à Pamiers et pour la restitution du consulat. Mais le jeune comte, qui est en fait un prince catalan, complètement tourné vers la Méditerranée perd son beau-père Jean 1er d’ Aragon en 1395 et se lance à la conquête de ce royaume. Il va guerroyer en Aragon pendant une bonne année pour être finalement battu par le frère de son beau-père, Martin d'Aragon, La ville de Pamiers a participé financièrement à cette expédition. En effet, le 19 octobre 1403, Jean Sartre, le trésorier général du comté de Foix reconnaît avoir reçu 2000 écus d'or de la ville lors du voyage en Aragon de Mathieu. D'autres indices très clairs : la ville rembourse le 12 novembre 1403 8 gros à un marchand qui a donné du blé de Vicdessos à l'époque où Matthieu est passé en Aragon. On règle le 25 juin 1400 tout un compte avec un marchand qui est alors allé à Barcelone.

Nul ne pouvait prévoir qu'au mois d'août 1398, à 24 ans, Mathieu de Castelbon allait mourir sans enfant. Dure perte pour la ville de Pamiers !! Avec lui s'éteignait la lignée directe des comtes de Foix. Son plus proche parent était le captal de Buch, Archambaud de Grailly, qui avait épousé la sœur de Mathieu, Isabelle, mais qui était totalement inféodé aux Anglais. C'est son oncle, le fameux capral de Buch qui s'était si brillamment distingué à Poitiers lors de la capture de Jean le Bon… Evidemment la France ne peut pas admettre que le Béarn, quasi indépendant et le comté de Foix passent sous contrôle anglais et la cour de France donne l'ordre au connétable de France, Louis de Sancerre de s'emparer du comté de Foix. Mais dans le même temps un certain nombre de seigneurs du comté de Foix et plusieurs villes, dont Pamiers, reconnurent Archambaud de Grailly comme seigneur.  Ce dernier se réfugia en Béarn et négocia avec la cour de France. Il avait laissé dans le comté de Foix son fils Jean qui arma ses fidèles et on se battit dans la plaine de Montaut. Le connétable de France fut battu. Il avait de son côté les villes de Mazères et Saverdun. Archambaud, fin négociateur, transigea : il se rendit à Paris et reconnut le roi de France comme suzerain pour le comté de Foix.

Mais la ville de Pamiers avait fait le mauvais choix et s'était battu contre M. le sénéchal de France. Cela va lui coûter son consulat, une nouvelle fois mais pour 94 ans. En se fondant sur l'appel interjeté devant le Parlement de Paris par le chapitre cathédral  le roi obtint le 23 décembre 1400 l'annulation  de ce dernier. Pour faire bonne mesure on ajouta dans les attendus que les consuls étaient les mêmes depuis 1391 (et cela est vrai) et que la justice n'était pas rendue … Voilà la ville sous le contrôle du viguier et du prévôt et dans une situation difficile, la plus difficile sans doute qu'elle ait connue depuis de longues années. D'abord la cité a fait la guerre à Mgr. Le connétable de France ainsi que les délibérations vont le répéter à satiété. Le roi a fait connaître son mécontentement mais que va faire Mgr. de Foix (jamais Grailly ne va être appelé autrement  dans les registres de la ville …) ?

La ville va devoir d'abord et avant tout payer la guerre. Mais comment ? Le petit peuple semble en effet ne plus vouloir continuer de payer des dons de milliers d'écus or aux comtes, pas plus qu'au Roi. Il se révolte en profitant de cette situation de faiblesse. C'est cela que nous montre le premier « livre de raison de l'hôtel du consulat de Pamiers » conservé par la ville. Il débute en 1399. La ville est en guerre. Les deux derniers mille écus accordés au bon comte Mathieu pour courir après la chimère aragonaise ne sont pas encore entièrement honorées, il faut régler les frais de guerre, relever les ruines. Après le nom des six consuls, qui sont sans surprise toujours ceux de 1395 - mais donnons-les : Jacques Acoquat, Jean Catala, Pey de Borgès, Jayme de la Ribiera, Pierre Bru et Jacques Martel - le lecteur se trouve en face de pages blanches : elles représentent les mois de turbulence. C'est d'autant plus étonnant que le papier est alors rare et fort cher.

On s'est battu en effet à Montaut et Pamiers a supporté une très grosse partie de l'effort de guerre. L'ennemi est arrivé aux portes de Pamiers et a détruit entièrement la teinturerie de Guilhem de Lacvivier à la porte de Couserans. La ville lui allouera en 1400 150 écus de réparation dans un acte notarié très solennel passé dans l'hôtel du consulat (on appelle ainsi faute de mieux cette maison commune). En juin, un forgeron répare la bombarde du Barriol. En juillet, la ville assume le paiement de l'approvisionnement des gens d'armes de Jean de Béarn (le fils d'Archambaud) depuis novembre 1398. C'est lui qui a dirigé les troupes à Montaut. En septembre la ville loue à l'attention de l'arbalétrier Vidal de Pégulha un hôtel particulier dans le quartier de Piconnières. Elle paie aussi le même mois une grosse provision de blé achetée pour 20 fr. à un marchand de Montaut pendant la guerre. La ville qui manque d'arbalétriers passe en mai 1403 un accord avec un certain Pey Danes qui répare déjà l'artillerie des arbalètes depuis sept ou huit ans. L'attendu de l'acte est très intéressant : la guerre a causé de grands dommages car elle était entre le roi de France, le comte d' Armagnac et le duc de Berry. Mgr. de Foix est le principal regidor (gouverneur) de la guerre. Ce même Pey Danes sera reçu un peu plus tard comme nouvel habitant de la ville et exempté de tailles sa vie durant mais pas de guet en temps de guerre. En contrepartie il devra s'occuper de l'artillerie de la cité et la tenir toujours en bon état. En mars 1404, le conseil étudie la supplique du châtelain de Vicdessos, Bertrand de Melho qui fait résidence à Pamiers et avait choisi d'y demeurer pendant les hostilités. Le comte de Foix l'a, en conséquence destitué et il demande un dédommagement à la ville qui a bénéficié de son savoir-faire. L'hôtelier Arnaud Melborguet réclame, lui, 60 francs or pour le logement des gens d'armes. Le conseil, lui, demande des éléments de réponse aux anciens consuls car le syndic de l'abbaye de Boulbonne réclame une gouttière en plomb prise à son hôtel.

Nouvelle alarme début 1404 : en février, le conseil envoie Jean Puey alias Peyrat à Perpignan pour y acheter de la poudre. Le 1er avril, on lit deux lettres closes de Mgr de Foix en début de séance : des bandes armées tiennent la campagne et il est demandé à la ville de faire le guet de jour comme de nuit. Les syndics promulguent une ordonnance transcrite in extenso sur la manière d' agir. Les portes de la ville doivent demeurer fermées de jour comme de nuit à Lestang, Sainte-Hélène, Loumet, Cailloup, la Porte neuve et En Colomies. La porte du côté du moulin du comte et de la teinturerie de Lacvivier sera tenue fermée de jour à l'exception des portanelles. A l'intérieur de chaque quartier les dizeniers doivent réquisitionner les chefs de famille pour faire le guet et organiser les veilles à tour de rôle. Le portier de chaque porte apportera les clés toutes les nuits aux syndics.

Le péril paraît être écarté en décembre et le Trentat ordonne aux syndics de faire ramasser dans « l'hôtel du syndicat » le quintal de fer tenu chez un certain Etienne Garnier du Camp ainsi que toute l'artillerie éparpillée sur les tours du Mercadal. Ceci doit être fait pour l'Epiphanie. On donne aussi cette année là 2 écus à Antoine de Py qui est allé trouver le connétable à Valcabrère et lui a demandé de ne pas troubler les habitants durant la taille des vignes.

Dès 1407, toutefois la guerre reprendra entre le comte de Foix et celui d’ Armagnac qui soutient ses anciennes prétentions sur le Béarn et le comté de Foix. L'incertitude va ainsi durer durant une bonne partie du XVe siècle mais il s'agira d'une guerre entre deux branches rivales de la maison de Foix à laquelle la ville apportera son aide mais elle ne sera plus jamais en guerre contre Mgr. le connétable de France. Archambaud de Grailly pourtant ne sera jamais très bien reçu en revanche dans la région et le calme restera précaire.

 

On peut légitimement se demander comment la ville s'est gouvernée durant ces mois de grande insécurité d'autant que la population ne paraît pas unie mais déchirée par des tensions intestines et qu'elle est par ailleurs accablée d'impôts. En 1399, lorsque commencent les registres de délibérations la ville n'a pas encore terminé de payer le don de 2000 écus or octroyés au bon comte Mathieu pour aller défendre ses prétentions à la couronne d' Aragon. Elle vient sans doute tout juste de terminer celui du don généreux qu'elle n'a pas pu manquer de faire pour le rétablissement du consulat. Bien sûr, en 1398, lorsqu'elle a pris fait et cause pour Archambaud de Grailly elle a financièrement soutenu son champion contre les troupes du connétable de France, nous venons de le voir. Elle a entretenu ses troupes, les a logées et nourries. Il est remarquable que les premiers actes du premier registre de délibérations soient des redditions de comptes. Très curieusement viennent ensuite quelques feuillets blancs, comme je l'ai déjà dit, puis deux actes reproduits intégralement, ce qui est rare. L'un promulgué par Archambaud, captal de Buch, comte de Foix est adressé au viguier de Pamiers et daté du 23 décembre 1402, le second émane de Bertrand, évêque de Pamiers et est en date du 24 décembre 1402. Ils indiquent que les gens du petit commun se soulevaient et demandaient des comptes car la ville avait des dettes. C'est la raison pour laquelle ils ont passé un accord avec les syndics de Pamiers car les impôts ne rentraient plus. Certains ne les avaient pas payés depuis plus de 15 ans au moins. Autorisation est donnée aux syndics de créer une commission communale pour répartir les impôts directs. Elle sera composée de 12 hommes, choisis par tiers parmi les plus gros contribuables, les fortunes moyennes et les petites gens. Tout au bas de la page, il a été noté après coup une demande faite le 28 décembre 1402 par laquelle de nombreux habitants (des membres du Trentat et des bourgeois de la ville) demandent que ces lettres subreptices (obtenues de façon déloyale) soient évoquées. A l'évidence, ces lettres n'ont pas été désavouées, elles ne sont pas biffées. Au contraire, la commission a régulièrement fonctionné pour mettre au point la perception de la taille selon le système de la première livre (système que j'ai expliqué plus haut). Elles ont été données sous la pression par les coseigneurs pour apaiser les esprits dans Pamiers et elles visaient à mettre en place un système de levée d'un impôt direct répondant au moins un peu à l'attente des classes moyennes. Qui étaient les meneurs ? Difficile à dire mais en juillet 1403 nous avons le compte des habitants du quartier de Roumengous qui paient pour terminer la dispute alors que le 10 février avait été noté qu'un compromis sur la première livre de la taille avait été trouvé et qu'une charte avait été passée. Et, la commission fonctionnant, les impôts ont été levés pour faire face aux dépenses pour tenter de recouvrer le consulat, payer la guerre, entretenir les remparts, finir de payer les dons promis aux comtes et assumer le dernier don de 3000 écus octroyé à  A. de Grailly à une date non connue mais à mon avis  avant  1402.

Dans les faits dès 1400 les syndics reprennent la place qu'ils occupaient avant 1390 et ce depuis 1330. On pare au plus pressé. Pour retrouver le consulat, on emploie la bonne vieille méthode : on envoie des émissaires simultanément à Carcassonne, Toulouse et Paris. En mai, Jacme Baure et Jean Bélenguier vont à Carcassonne munis de lettres rédigées encore à « l'hôtel du consulat ». Ils sont suivis le 10 août par Hugues Séré et Pierre Filhol qui eux vont à Paris d'où ils reviendront les 20 septembre et 14 octobre, enfin Jean de Calmels et M. Manant vont à Toulouse pour le fait des consuls. Quelques semaines plus tard on mande un syndic en Béarn à Mgr de Foix pour conserver les privilèges et retrouver le consulat. En 1406 encore, deux hommes iront à Paris, en vain bien sûr. Tous ces voyages sont longs et onéreux. En mars 1403 toutefois la ville recevra, à la demande de Mgr. de Foix est-il précisé,  du roi de France, non un nouveau consulat mais sa grâce pour son acte de rébellion. La lettre royale munie du sceau de cire verte est lue à l'hôtel du Conseil. On enverra un marchand au sénéchal de Toulouse pour en obtenir un vidimus (une copie).

Les 29 juin 1401 et 1402 les élections des trente conseillers et des syndics revêtent une solennité particulière au cours d'une sorte de cérémonie qui a lieu dans l'église du Mercadal. Le nom de tous les conseillers, les trente et celui des syndics est annoncé ainsi que celui des auditeurs des comptes et du prévôt. Dans « l'hôtel du Conseil » le 4 juillet suivant les syndics sont investis par le Trentat ainsi que le trésorier et les différents préposés à la perception des taxes et impôts. On choisit également les élus qui vont conserver les signets ou poinçons des six quartiers pour sceller les actes de la communauté. Les clés du sacraire (l'arche des privilèges de la ville) sont remises par les syndics de l'année précédente ainsi que celles de la cassette en noyer ferré. Mais que contenait donc le sacraire ? Nous pouvons légitimement nous le demander car le 1er mai 1400 lors d'un conseil on note le retour d'une des chartes des privilèges (mais par qui?) et sa mise au sacraire. Le 3 juillet suivant Jean de Calmels fait savoir que Guilhem de Lacvivier a entre ses mains trois chartes qui devraient être dans le coffre. Un essai de remise en ordre des affaires est à l'évidence tentée. On décide que tous les actes écrits dans « l'hôtel del syndicat » seront rédigés par des notaires. En janvier suivant, on établit le compte de ce qui est dû à Peyre Segui, le notaire qui travaillait pour le compte de la ville. Il est remplacé dans cette fonction par Thomas Ysarn qui reçoit pour sa pension 6 fr. au mois de décembre suivant. Les archives doivent s' accumuler dans l'hôtel des syndics et en mars 1406 la décision est prise de faire réaliser une armoire pour y mettre les livres : livres de comptes, livres de raison du conseil, rôles de la taille, estimes …  Chartes de privilèges et libertés demeurent bien sûr chez les Prêcheurs qui veillent si mal sur elles !

Le nouveau gouvernement de la cité au cours de cette reprise en mains vigoureuse installe une administration assez tatillonne.  On note soigneusement en langue vernaculaire (la langue d'oc), tous les cartels puntats, ces sortes de billets à ordre, les dispenses d'impôts, les autorisations d'entrée de vin dans la ville, les ordres donnés aux trompettes, aux crieurs. L'armoire va aussi conserver la comptabilité de la ville car la levée des tailles s'intensifie. Donner en régie la perception des taxes mises sur les viandes et les vins ne demande pas au conseil de tenir une comptabilité, simplement de faire rédiger un acte notarié. Il en va autrement de la levée d'une taille qui va exiger la réalisation d'un registre d'estimes et la tenue pour la perception de l'impôt de ce petit cahier appelé rôle. On lève des tailles pour les travaux faits aux murailles, à la tour du Barriol, à la grande chaussée, aux églises. Là encore les actes sont en langue d'oc mais on rédige en latin sur les registres de délibérations une analyse des actes de quelque importance qui seront ensuite instrumentés par le notaire payé par la ville à cet effet. Latin et Languedoc se côtoient donc dans ces registres et tous les actes notariés sont passés de la volonté des seigneurs Trente. Les conseils généraux, ceux auxquels les principaux chefs de famille sont convoqués le sont à leur demande expresse, pour répondre à leur désir.

Les syndics et le Trentat s'attellent en fait à deux tâches prioritaires : ramener la paix dans la cité et payer les dettes. Nous avons dans ses dernières la fin du paiement des 2000 écus pour la chevauchée en Aragon du comte Mathieu et ce don de 3000 écus fait à Mgr de Foix, le captal de Buch, don qui n'est explicité clairement dans les textes que comme « don promis à Archambaud de Grailly lorsqu'il est venu dans le comté »  le 14 novembre 1403, lors d'une assemblée élargie où figurent 49 chefs de famille (singulares). Cette énorme somme a-t-elle été promise du temps des consuls en 1398, avant la guerre ou en 1402 lorsque le comte et l'évêque acceptent la création du comité chargé de répartir la taille ? Il est impossible de le dire clairement. Ce qui est certain c'est que lorsque Archambaud de Grailly fait une entrée à Pamiers le 28 décembre 1402 il ne lui est pas demandé de jurer le maintien des privilèges de la ville et que le conseil ne prévoit pour cette visite que 20 pipes de vin, 20 setiers d'avoine et 20 torches de cire. Le comte était venu en 1398, avait-il alors promis de respecter les libertés ? Sans doute. Ce qu'il y a de sûr, c'est que le paiement de ces 3000 écus va être long et laborieux et se faire essentiellement grâce à la levée de tailles à un rythme soutenu : une perception à Pâques et une à Toussaint. La première mention de levée de taille a lieu le 3 mars 1402, on met en place la « paga » de Pâques. La taille se fera à partir du registre d'estimes, Le 17 mars, on remet au comte 400 écus sur les 1000 promis. Dès le 12 mai, les syndics indiquent au conseil que le comte fait grâce de 500 écus mais réclame les 1000 autres eà la « paga » de Toussaint. En août on envoie Jean de Calmels en Béarn pour expliquer à Mgr de Foix qu'une tempête a causé de graves dommages aux récoltes. 19 notables font des prêts (?) pour régler 97 écus sur les 100 encore dus depuis Pâques. Le 25 octobre (il n'est que temps!) a lieu une grande assemblée plénière en présence du prévôt qui décide de lever une nouvelle taille pour payer les 1000 écus encore dus au compte. A l'évidence la ville peine à payer ce don. Le 29 novembre le conseil décide de refaire les estimations des possessions mobilières et le 3 décembre d'exempter les pauvres. Bien sûr, parallèlement, la ville emploie toujours les bonnes vieilles méthodes et remet en février 1403 une pipe de bon vin à Pey de Rabonit, membre influent de la cour du comte qui leur donne de bons conseils. Le lendemain, le conseil annonce qu'il reste encore 1000 écus à payer à Mgr. de Foix. Pensant que l'impôt direct a rendu ce qu'il pouvait, les syndics et les Trente se tournent vers l'impôt indirect (l'ajude ou taxes sur les viandes et autres marchandises à l'exception du pain). Deux notables Leo et Barrau sont envoyés à Carcassonne où le marchand Raymond Taverna leur verse 1200 écus contre la levée de l'ajude. Parallèlement on envisage de faire rendre gorge aux consuls qui n'ont toujours pas rendu leurs comptes … On menace de leur faire un procès. La procédure, les Appaméens aiment …. et les syndics, les Trente et les anciens consuls fourbissent leurs armes … pour arriver à  un arbitrage amiable réalisé par six sages de la cité (trois pour chaque partie). Ils devront établir un compromis qui répondent à la volonté et au contentement du peuple.

En 1404, on pense à doubler la taxe sur les viandes, draps, vin etc.. On craint des soulèvements. Les finances sont vides. On emprunte 75 écus pour payer un reliquat des 1000 écus de l'échéance précédente. La ville est dite à plusieurs reprises très endettée et impécunieuse. A l'automne, on annonce aussi des travaux importants à faire au pont de Cailloup et à la grande chaussée. En fin d'exercice les syndics nomment des collecteurs pour expressément lever les reliquats des tailles levées pour don à Mgr. de Foix.

Et on va revenir à la levée d'une taille pour régler les derniers 1000 écus dus au comte. Parallèlement la ville tente une ultime négociation avec Mgr. de Foix. Deux hommes modérés sont envoyés en Béarn munis de lettres closes pour demander la prolongation de l'échéance.de mars 1404 attendu la rareté de l'argent. Car la paga du 1er novembre n'a pas été honorée et un conseil élargi se tient dans l'hôtel du syndicat le 14 novembre. Les consuls de 1398 y  ont été convoqués. Le prévôt y assiste ainsi que 49 chefs de famille. Un seul ordre du jour : la taille à imposer pour régler les 1000l écus dus pour la Toussaint passé. Jacques Acoquat, l'ancien premier consul de 1398 propose alors de trouver un arrangement (textuellement une bonne manière) avec Mgr de Foix, celui-ci pourrait leur faire grâce des 400 écus qu'il doit à la ville pour les provisions avancées à son fils, Jean de Béarn et à ses gens d'armes au temps de la guerre avec Mgr. le connétable de France car le captal de Buch avait promis de régler. Il est à la fin de ce conseil pris une autre décision : lever la taille en n’en exemptant personne et après avoir refait un évaluation de la fortune mobilière mais chaque contribuable n'en paiera que la moitié  … dans l'attente de la réponse du comte. Comme par hasard quelques jours plus tard arrive le vicomte Jean, le petit Johanot : étant donné sa pauvreté la ville ne le reçoit qu'avec une pipe de bon vin blanc et une pipe de vin rouge provenant de chez Bertrand Durfort, 16 écus, 10 setiers d'avoine et 11 torches de cire. Mgr. de Foix a très probablement accepté cette transaction et la ville offre une nouvelle pipe de bon vin à Pey de Rabonit qui lui donne quotidiennement de si bons conseils. Il est par ailleurs tout à fait naturel d'arriver enfin à un loyal compromis avec les consuls de 1398 qui ont eux aussi donné de si judicieux conseils. Le 12 juillet 1404, il est admis qu'ils ne peuvent pas clairement rendre leurs comptes et « de voluntate trentat » quitus leur est donné.
C'est ainsi que se termine le solde de ce don si généreux à un comte de Foix que la ville ne paraît guère aimer et que les consuls éphémères de 1391-1398 reçoivent leur quitus d'une gestion pour le moins anarchique. Mais la ville n'a pas perdu la face et grâce à quelques expédients a pu honorer ses promesses. Qui a en fait permis à Pamiers de sortir de ce mauvais pas ? Le compromis du 12 juillet 1404 est révélateur : le conseil de ville, ce Trentat qui impose désormais sa volonté. La population n'a pas plus confiance dans les syndics qu'elle ne paraît l'avoir eu dans les consuls. Les conseillers, choisis essentiellement dans ces gens de la moyenne et issus des six quartiers sont désormais les maîtres de la ville. Syndics, trésoriers et personnel de ville, surveillés par le prévôt et le viguier exécutent les décisions qui sont prises petit à petit non plus à l’hôtel du conseil, non plus à l'hôtel du syndicat mais de plus en plus souvent au trentat jusqu' à ce jour de 1432, un 29 février, où la décision est prise en conseil de faire faire une paire de sabots et la livrée accoutumée un valet de ville, Jean de Gorsse. La décision, on dit la prendre à l'hôtel du syndicat de la présente ville de Pamiers, « appelé comme ci-dessus est dit le Trentat ». Le tour était joué : l'hôtel de ville de Pamiers allait s'appeler le Trentat jusqu' à la Révolution.